DIRTY BOOTZ: avril 2009

Les vacances de Monsieur Pierrafeu

Certains veinards ont parfois la chance de vivre leurs rêves, à en rendre jaloux et envieux des bloggers aigris par la routine, tentant d'égayer leur triste quotidien en faisant partager des photos d'un autre monde...Fred appartient à la première catégorie (et moi à la 2ème, vous l'aurez compris...)et il a bien voulu nous faire partager son actuel périple en californie.

C'est tout frais tout chaud, ça a quelques jours à peine.

Bonne dégustation,

Bonjour de la Californie.Le soleil brille, un leger vent de mer est en train se lever, apportant fraicheur et embruns, et la journee promet d'etre superbe.Tout cela a son importance compte tenu du la journee passee avant-hier en plein debut du desert de Mojave, a 160 kilometres au Nord de Los Angeles, pour la 13 eme edition de la course classique "Corsa Moto". Il est a noter que l'organisateur de cet evenement n'est autre que le celebrissime (pour moi, en tout cas) Garage Company, bouclard/musee de Los Angeles tenu par l'emblematique Yoshi Kosaka. Qui, comme tout japonais qui se respecte, est une pointure dans son domaine (la vielle becane, donc), est courtois mais pas liant. En gros, il sourit quand il perd une dent... ou quand il demarre sa Harley Davidson de course KRTT, mais je vais y revenir un peu plus tard.Commencons par le commencement : le trip pour s'y rendre. Il est a noter que depuis 3 jours, je ne suis plus en Triumph T100. Celle-ci a en effet ete confiee au transporteur apres un voyage de 60 kilometres durant lequel j'ai change mes bougies sur le bord de l'autoroute a quelques centimetres des camions qui se faisaient un malin plaisir a venir carresser ma nuque longue (aussi connue sous le nom de mulet) et une creuvaison dont je n'ai pu venir a bout et qui a coute au transporteur de venir me chercher en "truck" a 5 miles du but... Damned...Je disais donc que depuis 3 jours, j'ai retrouve les joies du flat twin puisque le gars pour qui j'ai customise la BMW R 90/6 me la prete bien gentiment. Elle est evidemment identique a toutes celles que j'ai pu faire auparavant, mais avec la plaque americaine fixee sur le cote droit de la boucle arriere du cadre, elle a un charme supplementaire.Bien entendu, pas plus que pour la Triumph, cette moto ne possede de GPS. Donc pour se rendre d'un point A a un point B, une seule solution : Google Maps + papier + crayon + scotch pour fixer le "road book" improvise a l'avant du reservoir + priere pour que Google ait donne les bonnes indications (il est deja arrive une fois qu'il m'envoie dans la mauvaise direction).Je pars direction le Nord, bifurque d'une autoroute a l'autre telle Evinrude (nom dela libellule de Bernard et Bianca) et commence deja au bout de quelques kilometres a sentir une difference de temperature. Normal me direz-vous : dans le desert, il fait plus chaud. Sauf que la, la difference est dans l'autre sens. Il fait plus froid. Et pourquoi fait-il plus froid ? Ben a cause du vent. Et lui, le vent, il souffle. J'avais beau le sommer de s'arreter, rien n'y a fait. 120 kilometres a lutter pour ne pas faire d'embardee et me retrouver, telle une mouche (ou Evinrude, au choix), colle sur la calandre des monster trucks qui deboulent a toute allure par la droite comme par la gauche... y a pas ... ca fait les muscles... et ca fait se poser des questions quant au bien-fonde de cette expedition.Mais tout cela s'oublie vite quand, sans jamais s'etre perdu une seule ni avoir demande son chemin (en meme temps, a fond sur l'autoroute, c'est dur de demander son chemin aux gens du cru), on arrive sur le circuit de Willow Springs. Le circuit le plus rapide de l'Ouest, dixit les fameux gens du cru. Et on comprend vite pourquoi : apres la ligne droite des stands, une montee suivi d'une descente vertigineuse, le tout en forme d'omega.Donc vous l'aurez compris, a Willow Springs, c'est un peu comme au Bol d'Or Classique : une course de vitesse. La difference entre le BOC et ce que j'ai vu ? Pas grand'chose je dirais. Les memes pilotes soixantenaires (voire plus) qui continuent de poser le genou par terre dans chaque virage comme a leurs 20 ans, les memes odeurs d'ethanol et de nitromethane (pour les moteurs 2 temps), la meme effervescence autour de motos d'exception qui sont toutes nees avant moi et qui tournent encore comme de parfaites horloges, mais... mais... et c'est quand meme la ou c'est bien les USA d'Amerique, parmi ces motos d'exception, certaines que je n'ai jamais entendu / vu tourner : la fameuse Harley Davidson KRTT de course et la Harley Davidson XR 750 de dirt track.

Oui parce qu'a Willow Springs, et c'est aussi l'enorme difference avec la France, il n'y a pas qu'un circuit... il y a en 3. Un de course donc, un oval en bitume pour de droles de buggies (facon Nascar en plus petit), et bien sur, le fameux oval de terre pour les course de Dirt Track. Une photo de cet ovale en bitume reserve aux voitures :

Et ici je dis bien Dirt Track, car l'anneau est plus grand que celui du Ventura Speedway de la semaine derniere. Donc il y a bien deux lignes droites et deux grandes courbes a 180 degres tant et si bien que les pilotes, en entree de virage sont a un bon 160 km/h. Et il faut le voir pour le croire : sur des motos qui n'ont pas de frein avant, depouillees au maximum (donc legeres comme des plumes, ou des Evinrudes... decidement), dont les moteurs sont nourris de melange essence + Methanol par des carburateurs enormissimes, avec sortie d'echappement libre, ils n'hesitent pas une seule seconde, les cocos. Ils te couchent la moto sur le flanc gauche, te mettent la roue arriere en travers a quasi voire a 90 degres sans jamais, o grand jamais, lacher la poignee d'accelerateur. De toute facon un pilote a qui j'ai pu parler (qui court sur une moto identique a ma vert paillete) me l'a dit : en virage, si tu deceleres, tu reprends de l'adherence au pneu arriere. Si tu fais ca, "you're fucked for good". Ben oui : a ce moment la, la force centrifuge et l'energie cinetique emmagasinee vont transferer tout le poids de l'ensemble pilote + moto de l'aute cote (le droit, donc), tant et si bien que le pilote va passer par dessus sa monture et etre projete au sol. Ca s'appelle le coup de la raquette.Quelques exemples de moto que j'ai vu courir :

Alors quand je dis les cocos, je parle bien entendu de ces moustachus d'une soixantaine d'annees, le visage burine par le soleil et le vent du desert. Mais pas que. Figurez-vous qu'au milieu de toute cette testosterone, il y avait une fille. Et pas la moitie d'une. Un visage d'ange. Sans mentir. Limite David Hamilton-ienne. Mais une fois sur sa petoire, c'est autre chose. Un diable sorti de sa boite. Qui joue des coudes, accelere, couche la machine. Ne freine pas... ou peu... joue encore des coudes en sortie de virage pour... foutre la patee a ces messieurs devant une foule partagee entre joie (ses freres, surtout, edentes pour la plupart, bons rednecks des familles) et septicisme (une bonne partie des autres qui souhaiteraient, je l'ai imagine comme ca, garder ce pre carre de machisme a l'americaine pour eux).Et puis il y a aussi eu une course de "drifts". En voiture. Le principe, venu du Japon, est simple : deraper comme un malade et expres a chaque sortie de virage (donc perdre un max de temps) tout en tentant de finir premier de la course. Un mix entre patinage artistique et stock car !Et pour moi, donc, le clou du spectacle a ete de voir et d'entendre la fameuse Harley KRTT. Pour la demarrer, comme pour toute machine de course, il faut poser la roue arriere sur des rouleaux. Passer une vitesse (je suppose la seconde), debrayer et demarrer les rouleaux (branches a une batterie de voiture). La roue arriere est donc entrainee et quand on embraye, si la machine est bien reglee, elle demarre tout de suite.La moto dont je parle ici etait parfaitement reglee. Puisque des que le chef mecanicien (Yoshi Kosaka himself) a lache le levier d'embrayage, la moto a demarre. Pardon. La moto a rugi. Pardon. Le moteur de Arianne 5 s'est mis en marche. Pardon. Les Naazguul du Seigneur des Anneaux ont soupire. Pardon. J'ai perdu un tympan et saigne de l'autre oreille. Pardon. Yoshi a souri. Tout etait dit.Et moi, j'etais heureux comme un Prince ! Sourd, mais heureux comme un Prince du bitume.Maintenant, place aux quelques photos que j'ai prises. D'abord la fameuse KRTT avec Yoshi en plein demarrage :